Paul Appell (27 septembre 1855 [Strasbourg] - 24 octobre 1930 [Paris])
Ce qui frappe le plus, lorsque l'on s'intéresse pour la première fois à la vie de Paul Appell, c'est l'importance et la réussite de deux carrières distinctes menées en parallèle : une carrière de brillant mathématicien et mécanicien, marquée par la publication de plus de 250 travaux - une carrière d'homme de pouvoir et de responsabilités, qui le conduisit à être recteur de l'Académie de Paris (1920-1925) ou Secrétaire Général de la France auprès de la Société des Nations.
Paul Emile Appell est né le 27 septembre 1855 à Strasbourg. Ses parents, fervents catholiques, sont teinturiers et revendiquent, dans une Alsace déchirée entre France et Allemagne, leur identité française. Appell commence ses études à Strasbourg, mais la débacle de 1870 vient les interrompre. L'Allemagne de Bismarck annexe l'Alsace et la moitié de la Lorraine. Pour rester citoyen français, Appell s'exile à Nancy, où il se lie d'amitié avec Henri Poincaré. En 1873, il entre à l'École Normale Supérieure, et, trois ans plus tard, il passe son doctorat, consacré à la géométrie projective "Sur les propriétés des cubiques gauches et le mouvement hélicoidal d'un solide". En 1881, il épouse Amélie Bertrand, une nièce des mathématiciens Joseph Bertrand et Charles Hermite, et qui était aussi cousine d'Émile Picard. Ils auront 3 filles, dont l'une épousera ... un mathématicien : Emile Borel !
À partir de 1885, Appell est maitre de conférences à la Sorbonne, où il occupe la chaire de mécanique, puis, en 1893, il est élu à l'Académie des sciences. Son demi-frère réside encore en Allemagne, et ensemble ils agissent comme espions pour la France et contre l'Allemagne. L'autre événement qui secoue la France en cette fin de XIXè siècle est l'affaire Dreyfus. Appell est un dreyfusard de la première heure, et il sert comme expert lors de la révision du procès de Dreyfus en 1906. Entretemps, il gagne en 1899 la médaille d'or du roi de Suède pour un mémoire consacré "au calcul des coefficients de Fourier des fonctions quadruplement périodiques" et devient en 1903 doyen de l'université de Paris.
Quand la Première Guerre Mondiale éclate, Appell, qui souhaite ardemment le retour de l'Alsace à la France, est trop âgé pour participer directement au conflit, mais il crée le Secours National, un organisme semi-officiel chargé d'apporter de l'aide aux femmes de militaires et aux victimes civiles de la guerre. Et lorsqu'en décembre 1918, il revient dans Strasbourg libéré, il s'écrie : "Je croyais devenir fou en voyant le drapeau tricolore français sur notre vieille cathédrale". Dans les années 1920, il est le Secrétaire Général de la France auprès de la Société des Nations.
L'oeuvre mathématique d'Appell est marquée par la publication de 250 travaux dans des domaines variés : géométrie, mécanique, équations différentielles, fonctions elliptiques. Son nom est moins connu que ceux de certains mathématiciens qui sont ses contemporains, car si Appell a résolu de nombreux problèmes, il n'a pas créé de champ de recherche ex nihilo. Enfin, il faut aussi remarquer qu'Appell a créé le premier fonds d'aide à la recherche scientifique, véritable précurseur de notre moderne CNRS.
Cette biographie a été rédigée avec l'aide de Lionel Brejon.