Les chiffres tomographiques - exemple du chiffre de Chase
Description des chiffres tomographiques
Les chiffres tomographiques (on parle aussi de chiffres
à fractionnement ou à damiers) sont des méthodes pour chiffrer
les messages comportant au moins les étapes suivantes :
- une substitution de chaque lettre du message clair par plusieurs symboles (par exemple, par l'intermédiaire du carré de Polybe).
- un "éclatement" des symboles, par exemple au moyen d'une transposition.
Souvent, le chiffrement s'achève par le remplacement des symboles pour revenir à l'alphabet de départ.
Le premier exemple de chiffrement tomographique apparaît en 1859. Il est l'oeuvre d'un mathématicien américain,
Pliny Earle Chase, qui l'expose dans la revue American Mathematical Monthly. Plusieurs autres méthodes furent ensuite inventées
au cours de la fin du XIXè siècle, notamment par Félix-Marie Delastelle ou par Colon. L'utilisation de ces méthodes culmina sans doute au
cours de la Première Guerre Mondiale : le chiffre ADFGVX utilisé par les allemands en 1918, et dont le décryptement fut un événement important
pour la victoire des alliés, peut être considéré comme un chiffre tomographique.
Ces chiffres sont en général plutôt sûrs, car ils allient deux méthodes de chiffrement. Cependant, ils sont souvent difficiles
à mettre en oeuvre sur le terrain, justement en raison du trop grand nombre d'étapes nécessaires pour chiffrer. Ceci engendrait des erreurs de transmission,
donc des envois à répéter, fragilisant au final ces chiffres (c'est d'ailleurs une des raisons qui ont permis aux services du chiffre français
de venir à bout de l'ADFGVX).
Le chiffre de Chase
Nous allons chiffrer le mot AMERIQUE avec le chiffre de Chase.
On commence par remplir un tableau de 3 lignes et de 10 colonnes par les lettres de l'alphabet.
Les lignes du tableau sont numérotées 1,2,3 et les colonnes 1,2,3,…,9,0. Bien sûr, il y a 4 cases en trop, que l'on convient de remplir
avec d'autres symboles, pour nous %,$,&,+ (Chase proposait d'utiliser des lettres de l'alphabet grec). C'est ce tableau qui est la clé de chiffrement
et qu'il convient d'avoir communiqué au préalable au destinataire du message.
|
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
6 |
7 |
8 |
9 |
0 |
1 |
X |
U |
A |
C |
O |
N |
L |
Z |
P |
% |
2 |
B |
Y |
F |
M |
& |
E |
G |
+ |
J |
Q |
3 |
D |
K |
S |
V |
H |
R |
W |
T |
I |
$ |
On écrit d'abord verticalement, pour chaque lettre du message, ses coordonnées dans le tableau,
en notant d'abord la ligne. On obtient le tableau suivant:
A |
M |
E |
R |
I |
Q |
U |
E |
1 |
2 |
2 |
3 |
3 |
2 |
1 |
2 |
3 |
4 |
6 |
6 |
9 |
0 |
2 |
6 |
On multiplie alors la deuxième ligne du tableau précédent par 9, c'est-à-dire que l'on multiplie 34669026 par 9 pour obtenir 312021234.
On revient alors à une forme utilisant des lettres, en reprenant la méthode initiale, mais dans l'ordre contraire, c'est-à-dire que l'on écrit :
|
1 |
2 |
2 |
3 |
3 |
2 |
1 |
2 |
3 |
1 |
2 |
0 |
2 |
1 |
2 |
3 |
4 |
A |
X |
Y |
Q |
K |
D |
Y |
A |
M |
La dernière lettre par exemple est M, car c'est la lettre que l'on trouve dans la ligne 2 et la colonne 4 du tableau.
Seule la première lettre peut éventuellement poser problème, ici on aurait pu choisir n'importe quelle lettre de la troisième colonne.
L'algorithme pour le déchiffrement (connaissant la clé) est exactement identique, si ce n'est que l'on divise cette fois la deuxième ligne du tableau par 9.
Lorsqu'on chiffre de longs messages, on commence en général par le découper en blocs de petite taille (par exemple, 8 caractères), que l'on chiffre individuellement.
Remarquons ici l'avantage principal d'un tel chiffre. Les lettres ne sont pas codées individuellement, ou même par bigramme ou par trigramme.
Elles sont codées globalement, et l'analyse des fréquences ne peut absolument rien ici...
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